Edward Steichen
Biographie Par Roland Quilici
Retrouvez les livres de ou sur Edward Steichen sur l'espace shopping.
Le musée du Jeu de Paume organise une exposition qui présente quatre cent tirages vintage d’Edward Steichen. Intitulé « Lives in Photography », c’est la première rétrospective consacrée à ce photographe en Europe. Elle a lieu du 9 octobre au 30 décembre 2007.
Ce personnage a eu une influence considérable sur la photographie américaine du dix neuvième siècle comme photographe, et surtout comme "éminence grise" d'Alfred Stieglitz, chef de file de la photographie pictorialiste américaine. Il a été le conseiller technique et esthétique de Tom Maloney (fondateur et rédacteur en chef de la revue US Camera inspirée par (Arts et Métiers Graphiques), puis le commandant d'une unité photographique spéciale de la marine américaine dans le Pacifique durant la IIème Guerre Mondiale, et le premier directeur officiel du département photographique du Musée d'Art Moderne de New York. Toute sa vie il a œuvré pour la reconnaissance de ce médium, dans un premier temps auprès des élites artistiques, et dans un second auprès du grand public.
Eduard J Steichen est né le 27 mars 1879 à Bivange, Grand-Duché du Luxembourg. Sa famille émigre aux Etats-Unis alors qu’il est âgé de deux ans, à Hancock, (Michigan), en 1881. Son père travaille dans une mine de cuivre. Il va au collège de Pio Nono, et se passionne pour le dessin, encouragé par sa mère. Il quitte l’école, en 1894, pour apprendre le métier de lithographe à l’American Fine Art Company. A seize ans, il achète son premier appareil photo et apprend par lui-même. Il ouvre son studio de portraits et s’intéresse à la photographie de paysages. Trois ans plus tard 1899, ses photographies sont sélectionnées au « Second Philadelphia Photographic Salon ». Il reçoit une lettre d'encouragement de Clarence H. White l’un des fondateurs du Newark Camera Club en 1898, et de la Brotherhood of the Linked Ring de Londres en 1900 qui lui recommande de rentrer en contact avec Alfred Stieglitz au Camera Club de New York.
1900 : Trois de ses photographies sont aussi sélectionnées au salon de l'Art Institute of Chicago. Il obtient le second prix. Le jury est composé de Joseph T. Keiley et Clarence H. White. Steichen prend la citoyenneté américaine. Il change son prénom en Edward, avec un "w" en lieu et place du "u". Ses photos le font remarquer lors de l'exposition « The New School of American Photography » le 8 novembre 1900 à Londres. Clarence H White qui l’apprécie le recommande alors à Alfred Stieglitz, photographe renommé alors secrétaire du Photo Club de New York.
Expositions à Turin, Leeds et Hambourg.
En juillet 1900 il décide de partir étudier à Paris et en chemin rencontre Stieglitz à New York, qui lui achète 3 photographies. Ayant pris contact avec "The Brotherhood of the Linked Ring" et Frank Holland Day (les fondateurs du mouvement pictorialiste en Angleterre...et dans le monde), Steichen participe avec 21 tirages à l'exposition « The New School of American Photography » organisée par Holland Day (10 oct. – 8 nov. 1900) à la « Royal Photographic Society ». La même exposition ouvre ses portes à Paris le 22 février 1901 avec 35 photographies de Steichen.
Dès le début des années 1900, il commence une série consacrée aux "Grands Hommes". Premières expositions à Londres, Paris, Bruxelles et Glasgow.
A Paris, il visite des expositions de peinture et photographie, rencontre les artistes du quartier latin ; entre autres, Auguste Rodin à l’automne. Le sculpteur impressionné par son portfolio l'invite à côté de Meudon, et lui achète plusieurs tirages. Steichen exécute le portrait de Rodin à côté du monument dédié à Victor Hugo et face au Penseur. Il fait un montage (sandwich) des deux négatifs qui produit une image saluée par la critique.
Ayant rencontré une partie de l'élite artistique et intellectuelle française, il réalise une première exposition personnelle à la Maison des Artistes en 1902. Intitulé « Monsieur Eduard J.Steichen » elle se compose de peintures et de photographies. La même année le Salon du Champ de mars accepte une de ses peintures, six dessins au fusain, et dix photographies. De retour à New York, fin juillet 1902 il cofonde le groupe de la Photo Secession avec Alfred Stieglitz. Gertrude Käsebier, Clarence White, Joseph Turner Keiley, Frederick Evans, Frank Eugene et Alvin Langdon Coburn, en sont les autres membres. Le but de cette aventure est de faire reconnaître la photographie comme un art à part entière. « The Little Galleries of the Photo-Secession », ouvert en 1905 au numéro 291 de la Cinquième Avenue dans l’ancien studio de Steichen, est un espace ouvert à l’art moderne (photographie incluse) qui devient bientôt un haut lieu de rencontre des artistes et intellectuels de l’époque.
Le choix du terme Photo Secession fait référence aux artistes en Allemagne et en Autriche qui marquent la rupture avec la tradition académique. Stieglitz et Steichen considère que la photographie est un art, contrairement à l’opinion en vigueur à cette époque.
Steichen participe activement à la création et la publication de la revue de la Photo Sécession, Camera Work (entre 1903 et 1917). Ce magazine se propose de promouvoir l'art moderne et la photographie. Steichen conçoit le logo, la couverture et la maquette de la revue et conseille Stieglitz pour le choix du papier, de la typographie et des couleurs. En avril 1903, Camera Work sort son deuxième numéro entièrement dédié à Steichen. Les expositions se succèdent aux États-Unis et en Europe. Steichen remporte plusieurs prix.
Le 3 octobre il épouse Clara E. Smith.
1904 : il participe avec dix photographies à l'exposition Photo-Secession (A Collection of American Pictorial Photographs) organisée par Stieglitz à Washington.
Des expositions se succèdent, à Bradford, Dresde, Londres, Paris et La Haye qui lui décerne le prix de la meilleure photographie pour Rodin - Le Penseur.
1905-1906 : exposition de ses peintures et photographies à New York, Steichen collabore activement à la politique d'expositions de Stieglitz, ramenant de France des travaux de Cézanne, Rodin, Matisse, Picasso, Brancusi. Il repart en France en mai de cette année là et assiste en 1907 à une démonstration des frères Lumière sur leur invention : le procédé autochrome. Il est l’un des premiers aux USA à expérimenter l’usage du procédé couleur de Louis Lumière, (et à le commercialiser) plus connu sous le nom d’Autochrome en 1904. En 1908 "291" expose des dessins de Rodin envoyés par Steichen. Le photographe loue une maison à Voulangis. En février il revient à New York avec des dessins et peintures de Matisse pour "291". Il fera ces allers-retours jusqu'en 1914. En novembre 1910 il participe à l'exposition « International Exhibition of Pictorial Photography » à la galerie Albright de Buffalo (NY) avec 31 photographies. Ce sera la dernière et la plus célèbre des expositions de la Photo Secession.
Cette année-là à Voulangis il se lance aussi dans une autre passion : la culture des delphiniums (médaille d'or de la société française d'horticulture en 1914). Il participe à la Première Guerre mondiale en tant que premier lieutenant affecté au service de photographie aérienne. En 1917 la France lui décerne la Légion d'Honneur. En 1918 il est nommé directeur de la photographie aérienne des Forces alliées.
La guerre finie, il reprend ses activités commerciales : en 1921, il photographie Isadora Duncan la grande danseuse dans le Parthénon d’Athènes. Un an plus tard, il détruit sa production picturale et décide de quitter Voulangis, son lieu de résidence en France. 1922 : divorce. 1923 : il épouse Dana Desboro Glover. 1923, le groupe d’édition Condé Nast le nomme directeur de la photographie de ses revues à New York. Il prend alors en main la destinée de Vogue et Vanity Fair, deux revues de mode américaine. Il se spécialise dans le portrait et la mode ce qui va lui donner l’opportunité de photographier de nombreuses personnalités de l’époque telle Greta Garbo, Marlène Dietrich, Winston Churchill, Fred Astaire ,Gloria Swanson P Morgan, ou Henri Matisse.1929 Carl Sandburg publie « Steichen, the Photographer ». La même année, il rejoint l’agence publicitaire J Walter Thompson et fonde un studio de portrait à New York. Il acquiert une grande notoriété avec ses portraits. En 1929, avec Edward Weston, il organise la participation américaine à la célèbre exposition internationale de Stuttgart : « Film und Foto ». 1930, Son beau frère (Carl Sandburg) publie son livre de photo pour enfants intitulé The First Book. En 1931 il est nommé membre honoraire de la « Royal Photographic Society ». Passionné par l’horticulture, sa première exposition en 1936, au MoMA comporte une présentation de ses delphiniums cultivés à grand soins dans le jardin de sa résidence du Connecticut (il est alors président de l'American Delphinium Society). Il ferme son studio en 1938. Durant la seconde guerre mondiale, Edward Steichen dirige une section de photographes au sein de l’aéronavale. Il sert à bord du porte-avions Lexington en 1943. Il se voit confier une exposition intitulé « Road to Victory » au Moma. A la fin de la seconde guerre, en 1947 à l’âge de 68 ans il cesse ses recherches personnelles, et prend la direction du département photographique du MoMA à New York. Il y organise plus de 45 expositions dont la mondialement célèbre « The Family of Man ». Il lui faut trois ans pour préparer « The Family of Man » qui ouvre en 1955.
L’accrochage compte cinq cent trois photos sur les thèmes du pacifisme et de l’humanisme. Présentée dans trente-sept pays y compris l’URSS et admirée par plus de neuf millions, c’est l’exposition qui lui apporte la reconnaissance internationale. Steichen quitte ses fonctions à la tête du musée en 1962, après avoir organisé une exposition de ses photographies au Moma en 1961. Il se consacre à l’écriture de sa biographie, Steichen, a Life in Photography qui parait en 1963. En 1971 le Musée International de la Photographie à la Maison George Eastman (Rochester, NY) lui consacre une rétrospective. Il meurt le 25 mars 1973, à West Riding (Connecticut).
Lors d’une vente aux enchères à New York les 14 et 15 février 2006 à New York, sa photo d’un clair de lune intitulé « The Pond-Moonlight », prise en 1904 a été vendue 2 439 845 €.
Une reconstitution de sa célèbre exposition « Family of Man » est visible au château de Clervaux au Luxembourg depuis 1994.
Illustrations de l'article :
Photo 1 : Photo d'Edward Steichen par Fred Holland Day (1864-1933)
Photo 2 : The Pond--Moonlight (Mamaroneck, New York) par Edward Steichen
Photo 3 : Couverture de Life : Life Magazine - Greta Garbo par Edward Steichen
Retrouvez les livres de ou sur Edward Steichen sur l'espace shopping.
Pour en savoir plus sur l'auteur de cette rubrique :
Chronique par Roland Quilici
E-mail :