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IA : pour ou contre ?

 

Après la photographie argentique, puis numérique, voici venue la photographie "générée" (c'est-à-dire produite, ou corrigée) à la demande de n'importe qui, par une ou plusieurs intelligences artificielles (IAs).

Avec des résultats très variables d'une IA à l'autre, et dont on peut critiquer le caractère parfois figé, répétitif, glacé et même distordu (fréquentes mains à 4 ou 6 doigts ... entre autres fantaisies). L'adjectif "artificielle" accolé à "intelligence" est donc souvent approprié. Et assumé, puisque de nombreuses photos en IA sont délibérément extravagantes. Outre ce caractère artificiel (mais quand même possiblement esthétique), une photo en IA ne peut pas avoir une paternité avérée et unique, car une telle photo n'est pas "prise" stricto sensu par une personne déterminée avec un appareil dédié; elle n'est que proposée par un supercalculateur lointain, lui-même alimenté par d'énormes mémoires informatiques. N'importe qui peut ainsi solliciter et commander (à la voix ou par écrit) une IA grâce à ce que l'on appelle "des prompts" (injonctions adressées par un humain à l'IA). On peut même avoir recours à plusieurs IAs différentes avant de finaliser telle ou telle photo.

L'une de ces IAs signe d'ailleurs systématiquement de son nom seul les images qu'elle n'a fait que corriger, et non pas créer; comme quoi, si appropriation indue des images en IA il y a peut-être, elle est parfois à double sens, à savoir que l'IA ne se gêne pas pour s'inspirer de l'humain ou même pour le copier. Et j'écris "images" parce qu'au final, il s'agit plutôt d'images que de photos puisqu'elles peuvent être complètement recomposées ou fabriquées à partir de rien.

Rappelons cependant, au sujet de leur paternité éventuelle, que ni Kodak, ni Fuji (ni Gevaert, Agfa, Lumière, Guilleminot, etc.) n'ont exigé que l'on mentionnât leur nom sur les photos "prises" pendant près d'un siècle avec leurs pellicules et leurs diapositives.

Et il en est de même pour les appareils et les objectifs photo: aucun cliché n'a été signé Leica, Contax, Nikon, Zeiss, Sony, etc ! D'ailleurs, finalement, qu'est-ce qui compte le plus: l'appareil ? l'objectif ? la pellicule ? le laborantin ? celui ou celle qui a pressé sur le déclencheur ?

Pourtant, sans l'aide des supports essentiels de la photographie (pellicule ou image numérique d'un côté, appareil photo et objectifs de l'autre), aucun photographe n'aurait pu réaliser la moindre photo. La qualité d'un cliché ne dépend donc pas seulement du photographe. Loin de là. Il en est ainsi de l'IA comme de tous les autres systèmes de photographie précédents.

Quant au caractère artificiel des photos sollicitées en IA, rappelons que de nombreuses prises de vue traditionnelles, y compris certaines des plus célèbres, ont été abondamment "organisées" au lieu d'être exécutées à la volée comme il était prétendu. On peut donc se demander s'il était alors plus légitime de "prendre" des centaines de clichés de la même rue ou de la même personne qu'il ne l'est aujourd'hui de fournir à l'IA les descriptions et les corrections ("prompts") qui vont permettre de générer les images que l'on désire obtenir précisément.

En un mot, pourquoi faudrait-il bannir aujourd'hui l'usage de l'IA en photo, mais accepter les prises de vue répétitives qui ont été effectuées hier avec un appareil photo numérique ou argentique, prises de vue elles-mêmes (souvent) suivies d'un traitement d'image poussé (grâce à Photoshop ou autre)?

Lorsque Robert Doisneau (par exemple) prenait des centaines de clichés d'enfants faisant la roue, ou lorsqu'il organisait lui-même ces jeux de roue, comme si la rue était un studio, faisait-il encore de la photographie spontanée ? En fait, on s'en moque. Seul a compté le résultat.

Rappelons enfin que les photos sur plaques de verre du 19ème siècle étaient déjà minutieusement préparées et composées.

Demeurent cependant deux différences de taille entre l'IA et la photo traditionnelle :
1/ tandis que la photo traditionnelle "fixe" une petite partie du monde réel et présent, la photo en IA "fixe" un mélange de réel et d'irréel, d'actuel et d'intemporel, avec un fort penchant pour l'irréel ou, à tout le moins, pour un réel découpé en morceaux et recomposé ensuite pour constituer une image finale;
2/ tandis que la photo traditionnelle est "prise", attrapée "au vol", et de façon instantanée (même lors des séances de pose en studio), la photo avec IA nous est donnée (ou corrigée) sur demande expresse et détaillée de notre part.

Alors que nous saisissons sur le vif une photo traditionnelle, nous "ordonnons" à une IA de produire une photo selon nos voeux. Et non pas selon notre vue. Ou du moins : pas exactement.

Dernière remarque : il y a longtemps que la dimension artisanale de la photographie (qui incluait le développement des films et surtout leur agrandissement sur papier en chambre "noire", avec des cuves de révélateur et de fixateur, sans oublier l'agrandisseur), il y a longtemps que cette photographie artisanale a disparu au profit d'une photographie devenue artificielle dès lors qu'on l'a sortie de la chambre noire.

Prenons alors l'IA pour ce qu'elle est: une variante nouvelle de la photo, ou plutôt de l'image en général. Avec, d'ailleurs, un petit retour en arrière bienvenu: à savoir l'adoption fréquente du format carré des photos en IA, format nous rappelant qu'il s'agissait également de celui adopté pour deux des meilleurs appareils photo du 20ème siècle (Rolleiflex et Hasselblad). Format carré, qui est le seul à permettre un recadrage libre et a posteriori.

Conclusion : l'IA est bourrée de défauts, mais elle comporte aussi quelques qualités uniques. Pour vous en donner une idée, voici un petit échantillon de photos imaginaires qui ont été générées et/ou amendées avec l'aide de plusieurs IAs différentes, puis traitées avec un logiciel de retouche classique. Des milliers de "prompts" ont été nécessaires. Et des corrections a posteriori sans fin.

Qui a dit que l'IA allait nous rendre paresseux ?
En fait, c'est juste le contraire !

Texte et photographies par Ariel Alexandre

Au service de la photographie depuis 2001