Francis Vansteenwinckel
www.francisvan.com
Par : Frédéric Brizaud
Francis Vansteenwinckel est un talentueux photographe de voyage, atteint d'une maladie paralysante. Ne pouvant plus assouvir sa passion du voyage, Francis a souhaité créer un site Internet www.francisvan.com sur lequel il nous invite à un "voyage immobile". Et ainsi, à travers les textes et les images de ses multiples carnets de route, il convie le visiteur à prendre possession de ses "messages" et à partager son nouvel espace de vie. La photographie est devenue sa cellule et il la nettoie tous les jours.
Sur votre site vous proposez d'offrir à vos visiteurs une image par mois accompagnée d'un texte. Pourquoi ce choix?
Tel un petit "explorateur" solitaire, j'ai souhaité jalonner mon itinéraire de l'une ou l'autre trace, signes et traces répertoriés dans le vaste catalogue de mon vécu photographique. Et ainsi, comme le petit Poucet, je pose sur mon chemin de vie ces petits cailloux photo-écriture. Ils me permettent de respirer, de garder la raison et surtout de partager des instants privilégiés de rencontres entre l'image et l'écriture.
En quoi votre maladie a-t-elle changé votre vision des choses et votre regard de photographe ?
Lorsque j'ai appris que la maladie allait irrémédiablement monopoliser mon corps, j'ai pris une année sabbatique pour pouvoir effectuer mes derniers voyages, debout sur les deux jambes. Je suis retourné dans mes lieux-passion et j'en ai découvert quelques autres inconnus qui étaient sur ma liste "à faire". Ce fut bien évidemment un véritable délice, savourant chaque seconde, chaque paysage, chaque rencontre. N'accordant aucun dialogue, aucune concession avec la maladie et ce afin de nier jusqu'à sa présence, ma vision de la vie est devenue plus sereine et donc plus pleine, vivant avec plaisir l'instant présent, non sans consulter de temps à autre l'album des images anciennes, ni sans préparer de nouveaux projets et d'autres "voyages". L'acte photographique n'est plus un acte pur en tant que tel, il est un plaisir d'exister en synchronisme avec les petites choses du quotidien.
Vous invitez les visiteurs à partager votre "voyage immobile" par exemple en vous adressant un message. Une rencontre avec un(e) inconnu(e) n'est-elle pas finalement le plus beau des voyages?
Un voyage extraordinaire, il est vrai, chaque matin, lorsque je découvre ma messagerie et que des "voix" inconnues me parlent de tout et de rien, de choses capitales, de grandes laideurs et de petits bonheurs. J'y réponds toujours, avec mon ressenti du jour. Et, lorsque, assis au volant de mon autocar de la vie, je tourne la tête vers l'arrière, je vois qu'il se remplit davantage et que tous ces visages inconnus vont devenir mes compagnons de route, le temps d'un voyage à partager tous ensemble.
Vous préparez un livre, une fiction poétique intitulée "Dulcinée du Toboso, un amour de femme" pouvez-vous nous en parler?
Il s'agit effectivement d'une fiction poétique dans laquelle deux histoires vont se longer, se croiser sans cesse, se donner une énergie mutuelle. Celle de l'auteur d'abord, errant sur les chemins et les routes d'une Castille qui le captive, ce vaste espace ocre, la terre des exploits de ce héros universel qu'est Don Quichotte de la Manche. Celle de Dulcinée du Toboso ensuite, la Dame qui arme les bras du chevalier cervantin à la veille de chacune de ses batailles. Par une série de révélations confiées au lecteur, empreintes d'émotions, Dulcinée nous parle de son pays et de cet amour de Don Quichotte pour elle. Enfin elle peut prendre la parole et cette présence ainsi révélée offre un éclat et une magie particulière à l'oeuvre de Cervantès. Comme l'a exprimé le poète "la femme n'est-elle pas l'avenir de l'homme ?".
Chronique par Frédéric Brizaud
Site : www.photophiles.com
E-mail :