Corpus Christi,les représentations du Christ dans la photographie
Cette exposition regroupe un certain nombre de photographes ayant exploré la thématique christique. La période se déroule de 1855 à 2002, ce qui implique que la manière de concevoir le sujet est vaste, elle a nécessairement évolué avec son temps. Surtout elle a progressé en fonction des moyens techniques apportés par l'appareil photographique. Cela va simplement du passage au noir et blanc à la couleur, à celui de l'intimité du petit format à la grandiloquence ostentatoire du grand format.
La représentation du Christ a été durant des siècles le sujet de prédilection en peinture comme moyen de diffuser la foi. Par contre, le fait que la photographie s'approprie ce sujet génère une autre dimension à la question de la représentation du corps du Christ. Cependant cette exposition présente le lien étroit entre la peinture et la photographie notamment à travers une Etude pour une fresque de Delacroix 1853-56 de Eugène Durien.
La foi religieuse dans l'art est quasiment morte avec la peinture qui l'a représenté puisqu'elle n'est plus le sujet majeur de la figure. Dorénavant elle suscite la question sur la douleur, la souffrance, le risque de l'engagement.
La représentation du Christ d'un point de vue photographique reste assez énigmatique. Elle jongle avec la substance de la réalité ou la vraisemblance de l'idée du Christ jusqu'alors donnée avec des canons stricts : cheveux longs, barbe, sourcils épais, grand front. Un homme réel en chair et en os incarne cette idée christique. Parfois la réalité du sujet se dérobe à celle de l'image mystique. La vraie chair humaine ne désincarne-t-elle pas le Christ ? La mise en scène s'échange à la vraisemblance de la réalité même.
Beaucoup de portraits du Christ à la couronne d'épines s'exposent avec une esthétique de passion liée aux sujets. La dimension de la douleur est suggérée avec des visages expressifs, tout en ayant cette fascinante dignité divine.
Une installation intitulée The seven words en 1898 de Fred Hotland Day montre le visage du Christ avant de mourir. Des photographies poignantes s'affichent plus particulièrement celles de Bettina Rheims et Serge Bramly avec Couronne d'épines de 1997. Le front est incrusté d'épines d'où coule le sang du supplice mais l'extrême sophistication de la technique photographique procure une distance face à ce supplice.
Les différents moments de la passion du Christ figurent dans cette exposition : Le cheminement de croix, la crucifixion, la piéta. Des représentations du martyr figurent au sens général, que ce soit pour une cause ou lors d'une guerre.
La mort de la figure emblématique apparaît grâce à une photographie de Freddy Alborta de Che Guevara du 10 octobre 1967 dans son lit de mort. Toutes ces photos se regroupent sur le thème de la passion comme douleur et martyr sous l'emprise d'idéaux patriotiques.
La représentation des femmes entourant le Christ apparaissent tel que Marie et Marie Madeleine la pécheresse repentie. L'Ave maria de Bettina Rheims, une femme habillée de noir, derrière un océan tient un poisson qui se substitue au corps du christ. La mise en scène s'attache sur la valeur symbolique et les paraboles bibliques. Les poissons font allusion à la pêche miraculeuse. Tout n'est pas que souffrance, l'idée de la rédemption émerge à travers ces symboles christiques. Par contre l'exubérance de la vierge Marie s'exulte avec Une madone au garage en Assomption sur un pneumatique 1990 chez Orlan parée d'étoffes aux teintes attribuées à la Vierge Marie le bleu et l'or. Le kitch du duo Pierre et Gilles met également en scène le Christ. Cette exposition donne un regard digne face à la souffrance.
Laurence Bagot
Infos pratiques
Exposition d'octobre 2002 à janvier 2003
à l'Hôtel Sully
62, rue Saint-Antoine
75004 Paris
Tél. : 01.42.74.47.75
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Chronique par Laurence Bagot
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