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Valérie BELIN

Maison Européenne de la Photographie

La rétrospective de Valérie Belin est impressionnante de part la richesse des problématiques posées et la grandeur des tirages qui associés constituent un ensemble monumental. Ses séries les plus emblématiques en noir et blanc sont présentées ainsi que la toute récente et surprenante série de portraits en couleur  de femmes métisses. Avec un procédé implacable, elle dissèque des objets allant du trivial emballage de chips aux énigmatiques portraits de mannequins, elle affronte aussi l'autre dans des portraits. Quelque soit le motif photographié, il est systématiquement frontal face au spectateur avec des fonds neutres dépouillés de tout contexte.

Son processus photographique intransigeant ne laisse aucune place à la fioriture. Elle se concentre sur son sujet avec une rigueur infaillible. Le caractère spectaculaire de son travail lui donne de la magnificence.  Au début, elle s'intéresse au miroir, au reflet qui mettent en abîme l'espace. La série des chips est d'abord surprenante par son prosaïsme où le noir et blanc met l'accent sur le graphisme, la typographie plus ou moins stricte des lettres. Dans la catégorie des objets, elle pose son regard sur les moteurs et leur volume monolithique massif qui forment des labyrinthes quasi organiques. Lorsqu'elle prend possession d'un objet, elle lui confère une dignité et lui dévoile une singularité atypique. Elle le fait basculer de la tri-dimension à une surface plane où la lumière souligne des contours et des ombres.

Le musée de la dentelle à Calais lui fait une commande où elle présente toujours par le biais de la photographie les robes encore dans leur boite à la manière d'un cercueil. Les corps de celles qui les ont porté sont absents mais suggérés par les formes et les plis, comme si elles étaient habillées ou habitées par des âmes. La présence des robes donne une ambiguïté à l'absence. A l'inverse, dans les robes de mariées des marocaines, les femmes y sont à l'intérieur mais elles semblent engouffrées dans l'encombrant apparat. Avec les carcasses de voitures broyées, compressées après un accident, le caractère morbide de l'événement qui en a précédé est suggéré. La présence humaine est plus perceptible  à travers des séries de portraits. Elle photographie une série de femmes à la peau blanche, elles sont toutes de face. Parallèlement, elle met en évidence la beauté des visages des femmes noires qui ressortent sur fond blanc. Le processus photographique annule ce qui les différencie et ce qui les identifie en tant qu'être. Il y a une tendance à l'uniformisation. Chacune représente un archétype, une beauté type lisse dépourvue de toute expressivité où il ne transparaît aucune émotion. Seule la carnation noire ou blanche contraste radicalement d'une série à l'autre mais entre elles, il y a très peu de disparité. Loin de cette standardisation, le corps devient paroxystique et grotesque notamment avec les bodybuilders où il est surexploité, surdéveloppé avec une musculation proéminente, débordante. Dans un autre registre de monstruosité, les sosies de Mickael Jackson sont à force de coups de bistouri et d'opérations chirurgicales déformés, défigurés et deviennent des caricatures vivantes. La question de l'identité, de l'image de soi par rapport à l'image réelle, rêvée ou sublimée est posée avec force et vigueur. Les transsexuels renvoient au masculin et au féminin. Valérie Belin s'intéresse au corps paradoxale et dans ce qu'il a de plus extrêmes dans son apparence. Elle renverse le rapport dans la série des mannequins qui sont fascinants du fait qu'ils donnent l'impression d'être vivant.
Plus récemment avec les Métisses, elle introduit magistralement la couleur avec un jeu subtile de complémentaire ou de camaïeu. Les modèles sont impressionnants par l'aura qu'elles dégagent et leur beauté artificielle jusqu'à l'excès qu'elle font penser à des poupées. Elles se présentent face à l'objectif déjà habillées et maquillées, Valérie Belin n'intervient quasiment pas. Elle ne retouche pas les photographies, tout le travail technique s'opère en amont.

Laurence BAGOT

Infos pratiques de l'exposition

Du 9 avril au 8 juin 2008
Maison Européenne de la Photographie
5/7 rue de Fourcy 75004 Paris
Heures d’ouverture : Ouvert tous les jours de 11 heures à 20 heures, sauf les lundis, mardis et jours fériés.

Pour en savoir plus sur l'auteur de cette rubrique :

Chronique par Laurence Bagot
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Au service de la photographie depuis 2001