Man Ray

Les photographes célèbres Affichages : 43541

Par Roland Quilici

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photographie

Emmanuel Radnitsky est né le 18 août 1890 à Philadelphie (Pennsylvanie) aux Etats-Unis, de parents juifs d’origine russe (Saint Pétersbourg).Il est l’ainé d’une famille qui compte quatre enfants.1897 ses parents s’installent à Brooklyn, dans la banlieue de New York. Emmanuel se passionne pour le dessin dans l’atelier de confection de son père tailleur. Son intérêt pour la peinture se révèle en 1911 par la visite des musées et des expositions de la galerie 291, tenue par Alfred Stieglitz (photographe). Il entame des études de dessin à la National Academy of Design, puis au Ferrer Center. Il travaille comme apprenti, à la gravure de poignées de cannes et de parapluies, et comme dessinateur dans une agence de publicité. Il choisit de devenir artiste peintre. Il rejoint une communauté d’artistes à Ridgefield, dans la campagne du New Jersey en 1912, épouse Adon Lacroix, jeune poétesse belge qui est la femme d’un de ses professeurs (en 1913).

Il change de nom : Emmanuel, que l’on surnomme « Manny » devient Man et choisit le nom de Ray. Cette même année, il se rend à « L’Armory Show », la première manifestation d’art moderne outre atlantique qui  prend place dans le bâtiment du 69 ème régiment de la garde nationale à New York. Il découvre l’avant garde européenne, dont les œuvres de Marcel Duchamp et sa célèbre toile : « Nu descendant un escalier », qui fait scandale. A Ridgefield, Il publie un petit recueil : « The Ridgefield Gazook ».Septembre 1915 il fait connaissance de Marcel Duchamp (peintre français) qui lui fait découvrir l’esprit du mouvement Dada, ce qui l’enchante.

Revenu à New York, il travaille chez un éditeur de catalogues industriels de machines. Avec son ami Duchamp ils rencontrent Walter Arensberg, un collectionneur mécène et  Francis Picabia (peintre), dont le père est photographe. Suite à sa rencontre avec Hartpence (poète), il fait connaissance de Daniel un marchand qui ouvre une galerie à New York dans laquelle il expose en 1915, 1916, et 1919. Il ne vend pas de toile, et  les critiques ne lui réservent pas un bon accueil. Il vient à la photographie pour faire des reproductions des peintures de sa première exposition. Il dit : « Je résolus alors de préparer des reproductions de mes œuvres, destinées au catalogue et à la presse. Les quelques reproductions de mes tableaux faites par des photographes professionnels n’étaient pas satisfaisantes. Traduire la couleur en blanc et noir exigeait non seulement une certaine habileté technique, mais aussi une compréhension des œuvres à reproduire, et nul, pensais- je, n’était mieux placé pour faire ce travail que le peintre lui même».
photographieIl ne tarde pas à découvrir l’éventail des possibilités offerte par le médium, pour produire des œuvres photographiques comme : Man, Eggheater, Woman (Integration of Shadows) (1918-1920) et élevage de poussière(1920), cette dernière réalisée à partir d’un détail de la toile de Marcel Duchamp intitulée : « Grand Verre ».
1920, il fonde avec Marcel Duchamp et Katherine S.Dreier la « société Anonyme », qui se veut le premier musée dédié à l’art moderne.
Man Ray crée à cette occasion « Lampshade » un abat-jour qui prend la forme d’une spirale, qu’il suspend au plafond de son studio, puis qu’il  présente à la première exposition qui a lieu en 1920.
Mars1921 il expose sa première photographie lors du « 15 th Annual Exhibition of Photographs » à Philadelphie.
Après la publication d’un numéro unique de la revue New York Dada, avec Marcel Duchamp en avril 1921, Man Ray est déçu de ne pas trouver d’écho favorable, il se persuade que la France est le seul pays qui peut  donner lieu à ses expérimentations artistiques. La lecture des chants de Maldoror de Lautréamont suggérée par sa femme le conforte dans cette idée.
En juin, il envoie deux photographies au salon dada de l’exposition internationale de Paris.
Il quitte New York à trente et un ans, pour retrouver Marcel Duchamp à Paris, qui lui fait rencontrer la fine fleur des écrivains au café Carta. Ces intellectuels forment bientôt le groupe surréaliste, composé par Jacques Rigaut, André Breton, Louis Aragon, Paul Eluard, Philippe Soupault, et quelques autres. Arrivé à Paris sans argent, il ne parle pas un mot de Français, mais il possède une chambre photographique Graflex. On observe que dans ces années, la plupart des photographes qui côtoient le milieu de l’art à Paris, sont des émigrés comme André Kertesz, Germaine Krull, Brassaï, Eli Lotar, Berenice Abbott, ou Lee Miller.
Francis Picabia lui demande d’exécuter des photos de ses tableaux, d’autres artistes font de même, ce qui lui permet de subvenir à ses besoins. Il fait connaissance d’Alice Ernestine Prin, alias « Kiki de Montparnasse », une chanteuse ex modèle de Modigliani, Kisling, Foujita et Soutine. Elle devient son modèle, puis sa compagne durant six années. C’est elle qui figure de dos, un turban autour de la tête sur « le violon d’Ingres » l’une de ses photographies  célèbre, sur laquelle il dessine deux ouïes à  la mine de plomb et à l’encre de Chine. Kiki apparaît également dans ses films expérimentaux. 
Man Ray expose avec l’aide de Philippe Soupault à la librairie Six, « Exposition dada Man Ray » ce même mois de décembre 1921, mais il ne réussit pas à vendre ses toiles.
Il décide alors de s’établir comme photographe professionnel. La chance lui sourit en 1922, lorsque Gabriel Buffet-Picabia (épouse du peintre) lui présente Paul Poiret, l’un des couturiers renommés avec lequel il va avoir l’occasion d’exprimer ses talents. L’originalité et le non conformisme dont il fait preuve fait merveille dans le genre de la photo de mode. Il collabore ainsi avec des magazines divers et variés.
Tandis qu’il développe une série de photos de mode, Man Ray redécouvre le photogramme découvert par Fox Talbot. Il raconte : « Je posais machinalement un petit entonnoir de verre, le verre gradué et le thermomètre dans la cuvette, sur le papier mouillé, j’allumais la lumière. Sous mes yeux, une image prenait forme. Ce n’était pas tout à fait une simple silhouette des objets : ceux-ci étaient déformés et réfractés par les verres qui avaient été plus ou moins en contact avec le papier ; et la partie directement exposée à la lumière ressortait, comme en relief, sur le fond noir. »
photographieEn juin, le magazine Vanity Fair publie ses portraits. Fort de ce succès, en juillet 1922, il s’installe au 31 bis rue Campagne Première, dans un véritable studio.
« Champs délicieux », un album de douze photogrammes est rebaptisé « rayogrammes » par Tristan Tzara dans la préface publiée en décembre 1922.Ces images provoquent l’engouement du public. Man Ray rencontre l’avant-garde, et profite de cette occasion pour tirer le portrait de ses visiteurs. Devenu le photographe des surréalistes, ses images apparaissent dans Vu, la Révolution surréaliste, les cahiers d’Art, ou dans Minotaure, la revue d’Albert Skira. Le 20 novembre 1922, Jean Cocteau lui demande de photographier Marcel Proust sur son lit de mort, alors qu’il ignore tout de l’écrivain. La revue Vanity Fair lui offre la publication de son travail de Rayographie (a new method of Realizing the artistic Possibilities of Photography), dans son numéro de Novembre.
1923, Il rencontre la notoriété avec ses portraits : Georges Braque, Eisenstein, Le Corbusier, Ernest Hemingway, Pablo Picasso, Virginia Woolf, Henry Miller, T.S. Eliot, James Joyce, Elsa Schiaparelli, Gertrude Stein, Jean Cocteau, Kiki de Montparnasse, Eluard, Artaud, Tzara, Pound, sont quelques unes des figures du milieu artistique qui  posent devant son objectif.
1924, sa photographie : « le violon d’Ingres », est publiée dans le n° 13 du magazine « Littérature ». C’est Edward Steichen (photographe), qui lui recommande Berenice Abbot (photographe), comme assistante jusqu’en 1926.
1925, Man Ray participe à la première exposition du mouvement surréaliste à Paris à la galerie Pierre, au côté de Jean Arp, Max Ernst, André Masson, Joan Miró, et Pablo Picasso.
1926 il publie Noire et Blanche qui représente une sculpture africaine et la tête d’un modèle dans l’édition française du magazine Vogue.
Man Ray réalise des portraits en utilisant ce que l’on a coutume d’appeler à tort la solarisation. Il s’agit en fait d’un procédé connu sous le nom d’ « effet Sabatier ». La légende veut que Lee Miller, son assistante ait allumé la lumière par inadvertance à cause d’une souris, ce qui a pour origine la redécouverte de ce procédé. L’inversion de certaines valeurs laisse ainsi apparaître un contour ce qui devient sa marque de fabrique dans nombre de ses portraits. Il utilise cette technique sur ses négatifs.
1929, ami de la comtesse Marie-Laure de Noailles, il réalise un film  à Hyères à la villa de Noailles qui s’intitule : « Les Mystères du Château des Dés » et rencontre Lee Miller, un mannequin, qui devient  son assistante et sa compagne jusqu’en 1932. Elle deviendra aussi une photographe célèbre.

Le studio de Man Ray dans le 14 ème ardt de Paris, se trouve à quelques pas de celui d’Eugene Atget au 17 bis de la rue Campagne première. 1926, Man Ray fait sa connaissance et lui achète quatre tirages pour la revue : « La Révolution surréaliste ».
On doit à Man Ray la redécouverte d’Atget, photographe majeur qu’il présente à ses amis surréalistes, notamment à Berenice Abbott qui à la mort de ce dernier achètera un an plus tard ses archives. 
1930 Bill Brandt (photographe) inspiré par le surréalisme l’assiste quelques temps. Georges Ribemond Dessaignes lui consacre sa première monographie publiée chez Gallimard.
Il s’intéresse également au cinéma, et réalise plusieurs courts-métrages expérimentaux : «Le retour à la raison / The Return to Reason»(1923) 3 minutes, en 35mm. «Emak Bakia» (1926) 22 minutes, en 35mm ou « L’Etoile de mer » (1928).
Il collabore à différentes revues de mode, Fémina, Vogue, mais c’est avec sa publication dans « Harper's Bazaar » qu’il obtient la reconnaissance.
1934, Meret Oppenheim, une fameuse artiste surréaliste pose nue pour lui, devant la presse à eau forte du peintre Marcoussis, les mains couvertes d’encre.
1935, Man Ray réalise une série de photos de Nusch, la seconde femme de Paul Éluard.
1936, il rencontre Ady (Adrienne Fidelin) qui devient sa compagne.
1940, la guerre éclate, Man Ray est obligé de partir. Il  embarque pour les États-Unis au côté de Salvador Dalí, Gala et René Clair (cinéaste). Après quelques  jours passés à New York, las de ses obligations professionnelles avec Harper’s Bazaar, il rêve de partir à Hawaï, ou Tahiti pour se consacrer à la peinture, et pour vivre de l’air du temps comme Paul Gauguin. Finalement, il  gagne la côte Ouest pour poursuivre sa carrière de cinéaste à Hollywood. Bien qu’il y reste pendant plus de dix ans, il n’y trouve pas la reconnaissance escomptée.
Il renonce au cinéma et se consacre à l’enseignement de la photographie de 1940 à 1946, avant sa rencontre avec Juliet Browner, une danseuse  avec qui il se marie à Beverly Hills (1946).
1951une exposition de ses œuvres a lieu au MOMA.

1963, il publie son autobiographie : « Self portrait ».
Il revient à Paris, en septembre 51. Il s’installe au 2 bis de la rue Férou dans un atelier, où il vit et peint  jusqu'à son décès le 18 novembre 1976 à l’âge de 86 ans.

Man Ray a révolutionné la photographie en faisant de ce médium un art majeur. Malgré qu’il n’obtienne pas la reconnaissance comme artiste peintre par la critique américaine, il reste néanmoins dans l’histoire de l’art comme un artiste majeur, aussi bien comme peintre, sculpteur, que comme photographe.
Il dit : « Je peins ce qui ne peut être photographié, ce qui vient de l’imagination, du rêve, ou d'une pulsion inconsciente, et je photographie les choses que je ne veux pas peindre, les choses qui ont déjà une existence. »
Son propos résume son parcours d’artiste.
Les rayogrammes sont les seules images qui lui semblaient importantes dans son œuvre. Sur l’épitaphe de sa tombe au cimetière du Montparnasse à Paris, on peut lire : « Unconcerned, but not indifferent » (Détaché, mais pas indifférent).
Sa photographie intitulée : «Larmes de verre»,  a atteint 266 500$, lors d’une vente chez Christie's en 1997 ; « Noire et Blanche » s’est vendue 550 000 $ en 1998 chez Christie’s, à New-York.

 


"La retour à la raison" - France 1923 - Man Ray

 

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Exposition Man Ray

Heureuse coïncidence du calendrier, la Pinacothèque présente une magnifique exposition, qui retrace l’œuvre de Man Ray (l’Atelier de Man Ray : « Unconcerned but not indifferent », Détaché mais pas indifférent).  On pourra y voir des photographies, des  dessins, des peintures, des  sculptures, des films, et des objets créés par l’artiste.

Un rendez-vous à ne pas manquer à partir du 5 mars 2008 jusqu’au 1er juin 2008.

Pinacothèque  28 place de la Madeleine 75008 PARIS.
Site Web:
http://www.pinacotheque.com/

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Chronique par Roland Quilici
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